1. Introduction La renommée de la ville de Vancouver repose sur sa diversité : s'y côtoient montagnes, forêt pluviale, littoral océanique et vie urbaine. Ce paysage a été façonné dans un assemblage de différents types de roches, chacun ayant sa propre histoire géologique et donnant lieu à des formes de terrain caractéristiques.
Coupe simplifiée montrant les principaux types de roches sous la région de Vancouver et la nature des contacts entre eux.
Les assises de Vancouver : des plus variées
Les géologues distinguent cinq grands types de roches dans la région de Vancouver. Les plus abondantes sont les roches granitiques (1) et métamorphiques (2) de la chaîne Côtière et de la chaîne des Cascades. Dans la vallée du Fraser, ces lithologies sont recouvertes de roches sédimentaires (3), en l'occurrence de grès et de shales. Des intrusions volcaniques (4) remplissent les fractures dans les roches granitiques, métamorphiques et sédimentaires. Il y a aussi des roches volcaniques plus récentes (5) qui constituent l'édifice de volcans construits sur les roches granitiques et métamorphiques plus anciennes. Chaque type de roches est un agrégat de minéraux. La couleur, la texture, la dureté, la porosité et la composition chimique de chacun d'eux dérivent de la taille, la forme et la nature des ses minéraux constituants.
La formation des roches dans le grand "laboratoire tectonique"
Des roches sont en formation dans le grand «laboratoire tectonique» sous la partie sud-ouest de la Colombie-Britannique. La chaleur produite à l'intérieur de la Terre ainsi que la collision entre le continent nord-américain et la plaque océanique qui glisse en-dessous font que ce laboratoire est le centre de fabrication de plusieurs types de roches, mais aussi la cause des tremblements de terre et du soulèvement des montagnes dans la région de Vancouver. Les sédiments provenant de l'érosion des montagnes s'accumulent dans des bassins comme celui du détroit de Georgia et sont convertis en roches sédimentaires par l'enfouissement en profondeur. Les forces associées aux collisions tectoniques causent la déformation des roches crustales enfouies et créent de nouvelles roches dites métamorphiques. Les roches fondues refroidissent pour devenir des massifs granitiques ignés. Lorsqu'elles atteignent la surface, des volcans apparaissent. Avec le temps, des roches profondément enfouies sont amenées jusqu'à la surface par le soulèvement et l'érosion des montagnes.
Coupe simplifiée de la partie sud-ouest de la Colombie-Britannique montrant les processus géologiques en cours qui mènent à la formation des roches.
Whistler et les pentes de ski du mont Blackcomb.
2. Whistler: édifié sur des roches métamorphiques
Le paysage de Whistler, dans la chaîne Côtière, a été façonné par les rivières et les glaciers qui ont entaillé d'anciennes roches métamorphiques, vieilles de 100 à 200 millions d'années. Les roches métamorphiques sont formées à de grandes profondeurs sous la surface de la Terre, dans des conditions de température et de pression élevées, par la recristallisation et la déformation de roches plus anciennes déjà existantes. Le soulèvement et l'érosion ininterrompus des montagnes, processus qui s'échelonnent sur des millions d'années, font remonter ces roches profondément enfouies jusqu'à la surface.
Roches granitiques métamorphisées Le mont Blackcomb est une crête de roches granitiques métamorphisées. En plus d'être altérées et déformées, ces roches sont riches en quartz et en feldspath et s'avèrent beaucoup plus résistantes que les roches métamorphiques riches en mica observées dans la vallée de Whistler. Elles ont donc beaucoup mieux résisté à l'érosion par les glaciers et les cours d'eau; aujourd'hui, elles forment le mont Blackcomb et ses versants escarpés.
Vue de la chaîne Côtière à partir du mont Blackcomb.
Versants escarpés du mont Blackcomb.
Roches métamorphiques riches en micas Le village de Whistler a été construit sur des roches métamorphiques fortement foliées et riches en micas (schistes).
Cet escarpement de schiste se fracture facilement dans le plan de la foliation, d'où l'accumulation de fragments allongés à sa base. Cette foliation est attribuable à la formation de minéraux en feuillets de la famille des micas, au moment où les roches volcaniques étaient soumises aux contraintes du métamorphisme.
(Les lignes rouges indiquent l'orientation de la foliation)
Au microscope Schiste riche en micas vu au microscope. L'alignement des feuillets de muscovite (mica blanc) et de chlorite donne lieu à des plans de faiblesse, d'où la formation des fractures dans le plan de la foliation.
3. Le mont Garibaldi: de feu et de glace
Les prés alpins, les glaciers et les lacs bleutés extraordinaires du parc provincial de Garibaldi sont enchâssés dans un paysage volcanique où se côtoient coulées de laves volcaniques et cônes de cendres. Ces formes de terrain témoignent de l'interaction des produits d'éruptions volcaniques avec la glace des glaciers. Les éruptions volcaniques les plus récentes ont eu lieu lors de la dernière période glaciaire, qui s'est terminée il y a 10 000 ans.
Le volcan érodé Le mont Garibaldi, un volcan érodé, domine le centre-ville de Squamish du haut de ses deux kilomètres et demi d'altitude.
De violentes éruptions volcaniques ont édifié le mont Garibaldi il y a 15 000 à 20 000 ans, moment où un grand glacier remplissait la vallée de Squamish.
Les débris volcaniques qui se sont accumulés sur le flanc ouest du volcan recoupaient la surface du glacier. Quand le glacier a fondu, ce flanc du volcan s'est affaissé dans la vallée de Squamish.
Quand la lave pénètre un glacier Le sommet plat inhabituel du mont Table témoigne de l'éruption de lave sous un glacier stagnant qui, à un moment donné, recouvrait la région de Garibaldi. De la lave chaude a monté pour creuser un trou à la base du glacier et former un lac de lave entouré de glace. Plus tard, quand le glacier a fondu, la lave refroidie est restée, d'où la colonne de roche à sommet plat qu'on observe aujourd'hui.
Le lac Garibaldi: formé par un barrage de lave Le lac Garibaldi a été créé quand une coulée de lave s'est avancée dans une ancienne vallée, créant un barrage naturel qui a emprisonné l'eau de ruissellement. Les eaux de fonte glaciaire qui alimentent le lac sont chargées de fines particules de roche broyée (farine de roche) qui réfléchissent la lumière et donnent ainsi au lac son extraordinaire couleur bleu laiteux.
La 'dent noire': la racine d'un volcan La "dent noire" (Black Tusk) est une aiguille de roches volcaniques mesurant plus de 200 mètres de hauteur, peut-être le vestige d'un conduit pour la lave à l'intérieur d'un petit volcan surtout composé de cendres. L'érosion a enlevé toute la cendre non consolidée et il ne reste que le noyau de lave résistant.
Couches témoignant d'éruptions violentes Dans la vallée supérieure de la Cheekye, d'anciennes couches de cendres et de blocs volcaniques ont été mises au jour par l'érosion du mont Garibaldi. Ces couches ont été déposées par des avalanches de débris volcaniques encore chauds qui dévalaient les flancs du volcan lors d'éruptions explosives.
Au microscope La lave du mont Garibaldi consiste en une matrice rosée (m) dans laquelle baignent des cristaux de feldspath (f) et d'amphibole (a). La matrice se compose de grains très fins à l'échelle de la présente photo, lesquels ont cristallisé par le refroidissement et le durcissement rapides de la lave pendant l'éruption. Les gros cristaux de feldspath et d'amphibole ont commencé à se former en profondeur et ont été entraînés jusqu'à la surface quand le magma a monté.
4. Le «Chef»: un massif de granite
Les imposantes falaises grises du mont Stawamus Chief, localement appelé le "Chef", sont un site naturel célèbre de la région de Squamish. Des alpinistes de partout viennent mettre à l'épreuve leur talent sur ses parois verticales. Les roches granitiques qui le composent sont d'anciennes masses de matériel fondu qui a cristallisé à des kilomètres sous la surface. Le formidable soulèvement des roches et l'érosion continue sur des millions d'années ont amené ces roches profondément enfouies jusqu'à la surface.
Le "Chef" s'élève à plus de 600 mètres au-dessus de la route 99, à Squamish. Ses imposantes parois verticales sont le produit de l'érosion glaciaire le long de fractures dans le granite.
La majorité des voies d'escalade du "Chef" suivent des fractures dans le granite. Les alpinistes préfèrent le granite pour ses prises sécuritaires. La surface rugueuse du granite, qui fournit une meilleure prise aux alpinistes, est créée par l'altération différentielle des minéraux grossiers de la roche.
Depuis la route 99, on voit le "dyke noir", d'une épaisseur de quelques mètres, qui trace une ligne sur la paroi granitique. Le "dyke noir" a été formé par l'intrusion de roche fondue (magma) le long d'une ancienne fracture. Le dyke est constitué de basalte, une roche à grain fin qui est friable et que les alpinistes évitent. Les géologues estiment que le granite et le dyke sont vieux respectivement de 95 et 30 millions d'années. Le dyke était peut-être un conduit par lequel le magma montait jusqu'à un volcan en surface, lequel est aujourd'hui érodé depuis longtemps.
Au microscope Le granite est composé de cristaux imbriqués de quartz, de feldspaths et d'amphibole, formés profondément sous la croûte lors du lent refroidissement de la roche fondue. Cette image montre des cristaux d'amphibole qui prennent des couleurs vives lorsqu'ils sont observés sous la lumière polarisée.
5. Les canyons de la rive nord de l'inlet Burrard: le royaume du granite
Les sommets des montagnes de la rive nord de l'inlet Burrard, dans la région de Vancouver, se situent à l'extrémité sud de la grande chaîne Côtière, une série de crêtes montagneuses composée de roches granitiques et, en moindre quantité, de roches métamorphiques qui s'étend sur 2 000 kilomètres, depuis l'Alaska jusqu'à Vancouver. Il est facile de voir les roches granitiques sur les falaises le long de la route 1, à Vancouver Ouest, de même que le long des routes d'accès qui mènent aux centres de ski de Cypress Bowl et de Mount Seymour.
Photographie du canyon du ruisseau Lynn, un cours d'eau au lit tapissé de blocs, et du pont suspendu l'enjambant. Ce canyon a été entaillé dans le socle granitique par le ruisseau Lynn.
La rivière Capilano et son canyon qui entaille les roches volcaniques est l'exutoire d'un bassin versant montagneux. Le lac Capilano, une importante source d'eau pour la ville de Vancouver, a été créé en construisant le barrage de Cleveland pour noyer la partie supérieure du canyon de la rivière Capilano.
Vue du ruisseau Lynn à partir du pont suspendu. Dans son canyon, le ruisseau Lynn a creusé une série de bassins et de chutes dans le socle granitique. L'érosion est surtout due à l'effet de frottement des roches et des débris culbutés par le courant (affouillement) lors des crues hivernales.
L'abondance des gros blocs de roche dans le ruisseau Lynn témoigne de la puissance de ses crues. Le sable et le gravier, plus fins, sont entraînés vers l'aval, laissant derrière les gros blocs. L'abondance de blocs granitiques reflète la prédominance du socle granitique dans la région du bassin de drainage du ruisseau Lynn.
Les roches granitiques sont composées d'un mélange de minéraux foncés (à forte teneur en fer et en manganèse) et de minéraux pâles, lequel mélange leur confère une texture "poivre et sel". Les minéraux des roches granitiques sont notamment les feldspaths gris, le quartz, la biotite (mica noir) et les amphiboles.
6. Le parc Stanley: un paysage dominé par les roches
La presqu'île boisée du parc Stanley s'avance dans l'inlet Burrard. Les vagues soulevées par les tempêtes d'hiver dans le détroit de Georgia ont érodé le littoral ouest du parc jusqu'à faire affleurer le socle. La célèbre promenade du parc Stanley permet de jeter un coup d'oeil à la géologie du parc. Des grès stratifiés s'observent dans la majeure partie du territoire du parc, les roches volcaniques formant les falaises élevées de la pointe Prospect et du rocher Siwash.
Les intrusions volcaniques: à l'origine des falaises Prospect Point is a sheet-like intrusion (dyke) that formed when melted rock rose along a steep fracture in the sandstone. This 30 million year old volcanic intrusion is similar in age to the Black Dyke on the Stawamus Chief.
Les falaises volcaniques escarpées de la pointe Prospect contrastent avec les pentes douces des grès adjacents. Les grès, peu résistants, s'érodent beaucoup plus facilement que les roches volcaniques, plus dures. La presqu'île du parc Stanley doit sa taille actuelle à la présence de cette pointe de roches volcaniques résistantes au nord. Sans elle, les vagues de tempête auraient depuis longtemps érodé les grès tendres.
La pointe Prospect est une intrusion en feuillet (dyke) formée quand de la roche fondue a monté le long d'une fracture abrupte dans les grès. Cette intrusion volcanique a été mise en place il y a 30 millions d'années, soit un âge similaire à celui du «dyke noir» du mont Stawamus Chief.
On peut voir des joints formant des colonnes (colonnades ou orgues) dans les falaises de la pointe Prospect, résultat de la contraction au moment du refroidissement rapide et du durcissement de la roche liquide.
Les falaises de la pointe Prospect témoignent de la résistance à l'érosion des roches volcaniques dures. Elle sont constituées de basalte à grain fin, une roche de couleur foncée.
Le rocher Siwash est un élément du paysage célèbre le long de la promenade du parc Stanley. Il s'avère être ce qu'il reste d'une pointe de roches volcaniques résistantes, que les vagues ont érodé jusqu'à y ouvrir une brèche.
Les grès: anciens lits de rivière Des algues vertes recouvrent les grès stratifiés qui affleurent dans la zone intertidale de la pointe Ferguson. Les strates, de dureté variable, ont été érodées par les vagues, d'où la texture côtelée de la surface des roches. À l'origine, ces couches de grès étaient horizontales, mais le soulèvement des montagnes de la rive nord de l'inlet Burrard par rapport à la vallée du Fraser les a fait basculer vers le sud.
Les grès des falaises le long de la mer ont été déposées sous la forme de couches de sable au fond d'un ancien cours d'eau. Le pollen fossilisé dans les grès indique que le sable a été déposé il y a entre 87 et 35 millions d'années, période de l'histoire terrestre qui a vue l'extinction des dinosaures et l'émergence des mammifères. Bien que ces roches ne contiennent par d'os de dinosaures, il est fréquent d'y trouver des petits fragments de bois transformés en charbon.
La transformation en roche d'un dépôt de sable riche en cailloux suppose un enfouissement en profondeur et la formation d'un ciment de minéraux par circulation d'eau souterraine. Dans le cas présent, l'enfouissement s'est fait par le dépôt continu de plusieurs kilomètres d'épaisseur de sédiments dans un ancien bassin qui ressemblait à l'actuelle vallée du Fraser. Un soulèvement ultérieur a ramener ces roches sédimentaires à la surface.
Au microscope Les grès du parc Stanley se composent d'un agrégat de grains de quartz (q) et de feldspath (f) ainsi que de petits fragments de roche (r). Les grains sont faiblement liées ensemble par un ciment de calcite (c) et d'argile..
7. Le mont Baker: montagne de feu
Le profil en forme de cône du mont Baker domine l'horizon au sud de Vancouver. Alors qu'il est entouré de montagnes plus basses édifiées par le lent soulèvement de la croûte terrestre, le mont Baker a été érigé par des éruptions volcaniques répétées qui, depuis les derniers 40 000 ans, accumulent lave et cendre. La forme conique du mont Baker indique que l'accumulation de matériaux volcaniques a été plus rapide que l'érosion par les glaciers et les cours d'eau. La dernière éruption du mont Baker remonte aux années 1800.
Le mont Baker a été construit par de nombreux épisodes d'épanchement de lave et de dépôt de cendres volcaniques. L'histoire de cette activité volcanique peut être reconstituée dans les couches qui affleurent dans le cratère Sherman, près du sommet du mont Baker. Le cratère Sherman a été le site de petites éruptions pendant les années 1800 et d'émanations de gaz volcaniques pendant les années 1970. Le mont Baker fume encore aujourd'hui.
Le volcan du mont Baker s'élève à 3 300 mètres au-dessus de Vancouver. Toute éruption future représente un risque potentiel pour Vancouver et pour la région des basses terres du Fraser.
Le sommet du mont Baker est recouvert de glace. De futures éruptions pourraient faire en sorte que la glace fonde rapidement, ce qui pourrait liquéfier les matériaux volcaniques non consolidés et déclencher des coulées de boue meurtrières. De telles coulées descendent les vallées des cours d'eau à grande vitesse et peuvent dévaster les régions en aval sur plusieurs dizaines de kilomètres.
Au microscope Cette lave est composée de cristaux rectangulaires de feldspath et de vides (empreintes de bulles de gaz). Quant à la matrice, elle consiste en des cristaux très fins à l'échelle de la présente photo, lesquels n'ont pas eu le temps de grossir parce que la lave s'est refroidie trop rapidement après l'éruption. Les cristaux de feldspath ont pu croître parce qu'ils se sont formés dans des chambres magmatiques remplies de roche fondue refroidissant lentement (le magma), loin dans les profondeurs de la Terre; ils ont été entraînés à la surface quand le magma a fait son ascension. Le refroidissement rapide a emprisonné des bulles de gaz qui tentaient de s'échapper de la lave, ce qui a donné à la roche une texture spongieuse.
Réalisation : Robert J.W. Turner, Jessica Page, Michelle Klassen, Helena Quo Vadis et Andrea Jensen
Cathie Hickson, Tom Harding, Andrew Humphries et Wendy Lewis ont fait des révisions constructives des versions préliminaires de cette affiche.